Emile SAINT-LOUIS (de)

(1818-?)
Photographe itinérant
3 photographies

Fils d’un cordonnier, Jean Louis Emile Gratier (*) est né le 5 mars 1818 à Versailles (Yvelines). Veuf en janvier 1819, son père se remariera cinq mois plus tard. Jean Louis Gratier est employé à l’hospice Brézin à Garches (Hauts-de-Seine) quand il se marie à Versailles le 21 janvier 1843 avec Anastasie Hue, ouvrière en linge.

 PARIS : Le couple s’installe à Paris. Jean-Louis Gratier et son épouse sont quincailliers aux Batignolles lors de la naissance de leur fille Anne-Marie le 9 novembre 1847. Trois ans plus tard, le 29 mai 1850, ils ont un fils prénommé Charles Emmanuel qui voit le jour au 4, boulevard Saint-Martin où son père est marchand de bimbeloterie. En décembre 1850, associé à Lamiche, Gratier dépose un brevet « pour l’application de certains métaux, tel que le platine, le palladium, etc  à toute espèce de verrerie à l’effet d’en varier les couleurs pour l’agrément de la vue et de les rendre brillantes sans brunissage ». (1) François Benjamin Lamiche ayant pratiqué le daguerréotype à partir de 1854 environ, on peut penser qu’il n’est pas étranger à la reconversion de Gratier qui après avoir été marchand de bibelots sera photographe.

PHOTOGRAPHE AMBULANT : A une date qui reste à préciser, Jean Louis Gratier quitte sa femme et ses deux enfants et devient photographe ambulant sous le nom d’Emile de Saint-Louis. Au dos de ses portraits, il se présente comme "Chimiste - Artiste - Professeur de Photographie" et mentionne une adresse à Paris 13, rue Richelieu. Tout cela visait plutôt à impressionner les modestes provinciaux qui venaient se faire photographier dans son "Atelier de voyage" stationné sur la place des bourgs où il s’arrêtait. En 1872, Louis Gratier est de passage à Chinon (Indre-et-Loire). Il partage un logement avec sa compagne du moment Césarine Roussinet, âgée de 32 ans, native de Vendôme (Loir-et-Cher) qui voyage avec son fils Théodore Jougon, âgé de 12 ans.  Par la suite, c’est avec la très jeune Marie Louise Mauchien que le photographe partira en tournée. Elle lui donnera trois enfants. Gaston, l’aîné, qui ne vivra que quelques jours est né le 27 décembre 1877 dans la roulotte de son père, "photographe touriste", stationnée sur la place d’Oucques (Loir-et-Cher). Sur son acte de naissance, sa mère est déclarée âgée de 20 ans alors qu’elle n’en avait pas 15. Le couple est de passage à Saint-Antoine-de-Rochefort (Sarthe) quand naît leur fille Berthe, le 19 décembre 1878. Leur troisième enfant, Georges Gaston est né le 10 août 1881 aux Baux-de-Breteuil (Eure) "fils de Jean  Louis Emile Gratier de Saint-Louis, photographe ambulant, âgé de 52 ans, domicilié de fait en cette commune et de droit à Paris rue Richelieu n°13 et de Berthe Marie-Louise Augustine Mauchien, artiste ambulante, âgée de 22 ans ». « L’artiste ambulante » va bientôt se retrouver seule avec ses deux enfants. Jean-Louis Gratier l’abandonne comme il l’avait abandonné son épouse légitime. En 1888, alors qu’il est de passage à Douvres (Calvados), il part sans laisser d’adresse. La photographie du communiant reproduite sur ce site doit dater de cette époque. Au dos, on peut lire : Emile de Saint-Louis - Professeur de photographie - Villers-sur-Mer - Calvados". Après avoir arpenté la Normandie, le photographe a travaillé en Anjou jusqu’à un âge avancé. En septembre 1901, dans sa 84e année, il se présente devant les gendarmes de Pouancé (Maine-et-Loire) pour leur raconter comment il s’est fait gruger par sa domestique et l’homme qui avait promis de l’épouser, Gaston Dupuis, garçon boulanger. Pendant deux ans, Dupuis vivra au crochet du photographe. Quand celui-ci l’envoie se faire pendre ailleurs et dépose plainte, Dupuis l’insulte et le menace. Mais il va bientôt faire pire. Le 1er septembre 1901, Dupuis et sa compagne chargent dans l’une des voitures de Gratier ses appareils de photographie et partent en lui promettant de lui envoyer les épreuves qu’il n’aura qu’à terminer. Bien évidemment, le vieil homme n’en reçu jamais une seule. « Sans moyen d’existence », il se rendit à la gendarmerie pour déposer plainte. Ce vol a probablement mis fin à la carrière de celui qui, en 1901, devait être le doyen des photographes ambulants.

 Cette notice doit beaucoup aux informations que m’a transmises Michel Gratier de Saint-Louis, arrière-petit-fils du photographe.

  (*) Sur l’acte de naissance, il est prénommé Jean Louis, le prénom Emile n’apparaît que sur l’acte de naissance de son fils en 1850. A noter   que le patronyme "Gratier de Saint-Louis" ne figure ni dans les actes de naissance et de mariage de Jean Louis, ni dans ceux de son père, Jean-Marie, qui s’est marié trois fois à Versailles où il est décédé en 1857.

Sources :

(1)  Institut national de la propriété industrielle (INPI) Base brevets du XIXe siècle Brevet 1BB 10811

(2)  Gallica - Retronews   « Le Petit Courrier » du 22 septembre 1901 – « Les déboires d’un photographe ».